Droit & Jurisprudence
N°613 Juillet - Août 2023
Panorama de jurisprudence
Le droit du patient à la rectification des données contenues dans son dossier médical, confronté au Règlement général sur la protection des données (RGPD)
Cour administrative d’appel de Paris, 15 avril 2023, n° 22PA01320
Une patiente sollicite d’un établissement hospitalier le retrait de certaines mentions d’un compte-rendu d’entretien qu’elle a eu avec un psychiatre, à la suite de son admission au service des urgences en raison d’une crise d’angoisse, et dans lequel elle évoquait des éléments de sa vie personnelle. En raison du refus de l’établissement hospitalier de faire droit à sa demande, elle invoque devant la juridiction administrative les dispositions du règlement européen n° 2016/679 du 27/04/2016 relatif « à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données » (RGPD).
La patiente soutient qu’elle n’a pas donné son consentement au recueil et à la conservation de données personnelles sensibles, ni été informée du recueil de ces données et de son droit à rectification. Pour confirmer le rejet de sa demande, la cour analyse tout d’abord les éléments contenus dans le compte-rendu du psychiatre et estime que ceux-ci, « qui peuvent contribuer à l’appréciation de son état psychologique et à la prise de décisions thérapeutiques, constituent des données qui peuvent être inscrites au dossier médical de la patiente en vertu des dispositions de l’article R.1112-2 du code de la santé publique ».
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Dès lors, pour la cour, dans la mesure où ces données peuvent faire l’objet d’un traitement de données à caractère personnel en vertu des dispositions1 du RGPD, les médecins de l’établissement hospitalier n’étaient pas tenus de recueillir le consentement de la patiente avant de mentionner ces éléments dans son dossier médical. De même, dans la mesure où il peut être dérogé au droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement de données personnelles en cas de motifs d’intérêt public dans le domaine de la santé publique (art.17.3.c), l’établissement hospitalier était légitime à refuser de procéder à l’effacement des données personnelles de nature à contribuer à l’appréciation de l’état de santé de l’intéressée.
Toutefois, la cour estime qu’en application des dispositions de l’article 13.2 du RGPD, il appartenait à l’établissement hospitalier, en tant que responsable de traitement, d’informer la patiente de son droit à demander la rectification de données à caractère personnel présentes dans son dossier médical. En s’abstenant de le faire, la cour estime que l’établissement a commis une faute mais considère que cette faute n’a entraîné aucun préjudice dans la mesure où la patiente a pu faire valoir son droit à rectification.
En définitive, le droit du patient à solliciter la rectification ou la suppression de données personnelles semble limité à des informations objectivement incomplètes ou erronées et ne peut en aucune façon lui permettre de réécrire a posteriori son parcours de soins. Comme l’a rappelé la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 25 mai 2023 (n° 20/01744), « la réalité d’une hospitalisation, de ses conditions et des traitements médicamenteux éventuellement suivis, fussent-ils irréguliers, ne constitue pas une information inexacte, incomplète, équivoque ou périmée et n’ouvre pas droit à modification ou suppression ».
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