Réflexions hospitalières

TRANSITION DE GENRE

N°626 Septembre - Octobre 2025

Transition de genre – Entendre la transition adolescente

Si l’expression d’un nouveau genre pouvait servir de chrysalide à l’adolescence, comme elle sert à la chenille pour devenir papillon, l’enjeu clinique serait de ne pas la cristalliser. Le rôle du clinicien pourrait alors s’envisager comme un cocon pour accompagner l’adolescent dans cette transition essentielle, l’aidant à embrasser l’incertitude propre à l’entrée dans l’âge adulte.

Capucine Lamoureux Psychologue clinicienne
Anna Cognet-Kayem Psychologue, PhD, HDR, enseignante associée LPCN,
université Caen-Normandie
En collaboration avec la Chaire de Philosophie à l’Hôpital


29/09/25

Pour mieux saisir les enjeux contemporains de la relation d’aide autour de la transidentité, un détour historique s’impose. En effet, les termes « transition de genre » et « transidentité » recouvrent aujourd’hui un spectre de situations bien trop large pour se laisser enfermer dans une seule dénomination. Ils ne peuvent pas s’inscrire non plus dans l’utilisation du diagnostic de dysphorie de genre tel que défini dans le DSM-5 1, pourtant amplement utilisé ces dernières années. De fait, le diagnostic de dysphorie de genre interroge aujourd’hui dès lors qu’elle ne s’accompagne pas d’une souffrance exclusivement liée au genre, ou que cette souffrance n’apparaît pas dès l’enfance.

Ainsi, chez de nombreux adolescents, la demande de transition peut exprimer une diversité d’angoisses – pubertaires, identitaires –, voire masquer d’autres problématiques. Une des raisons explicatives de la confusion autour de l’utilisation du diagnostic de dysphorie de genre pourrait se trouver dans le glissement terminologique opéré par la définition du DSM-5. Dans sa formulation « le trouble est accompagné d’une détresse cliniquement significative ou d’une altération du fonctionnement social, scolaire ou dans d’autres domaines importants », le manuel remplace l’idée d’« insupportable » par celle de « détresse », un terme plus contextuel et fonctionnel.

En effet, la dysphorie, du grec dusphoria, signifie « difficulté à supporter », alors que la détresse, du latin distringere, renvoie à la notion d’étroitesse, de gêne, de contrainte. Ce déplacement lexical et conceptuel fait passer l’accent d’un affect insoutenable et subjectif à une souffrance contextualisée, marquée par un sentiment d’étrangeté à soi ou au monde social, voire d’enfermement dans une norme inadéquate. Il ne s’agit donc plus seulement d’un vécu psychique difficile à supporter, mais d’une incongruence vécue comme limitative, source d’angoisse et de difficulté à fonctionner.


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